Un pas dans l’histoire…
La barrique a proprement parlé a été utilisée par les gaulois jusqu’au IIe siècle pour conserver la cervoise (ancêtre de la bière), puis, les romains en conquérant la Gaule ont ensuite diffusé ce tonneau durant le IIe siècle. Au IIIe siècle, il était alors majoritairement utilisé dans l’empire.
Les amphores, utilisées depuis l’antiquité par toutes les civilisations, deviennent alors obsolètes. La raison principale de ce changement de pratique est la faible maniabilité des amphores contrairement aux barriques qui peuvent rouler et être plus facilement transportables d’un port à l’autre ou sur les routes commerciales.
Ces fûts avaient plusieurs caractéristiques qui révolutionnèrent le monde du vin :
Solidité : Les tonneaux sont beaucoup moins fragiles que les amphores. Fait à partir de Pin et d’Epicéa au début, ils ne tardent pas à être fabriqué à partir de Chêne comme aujourd’hui.
Transport et stockage : Les amphores initialement utilisées ne s’empilent pas, les tonneaux si. Voilà pourquoi il était plus simple pour les commerçants, à cheval ou sur un bateau, de transporter plus de barriques. Déplacer ces dernières était plus facile : les Hommes les faisaient rouler sur le flanc.
Gestion du vin : On peut déjà parler d’œnologie, le vin était déversé sans effort dans la barrique et on pouvait effectuer les soutirages grâce à la bonde.
Légèreté : Le tonneau est 4 fois moins lourd à vide qu’une amphore de même contenance.
Au IIIe siècle, la barrique est présente dans toute la Gaule, si bien que des barriques de différentes tailles ont été installés dans différentes régions. En Bourgogne, la contenance était de 228L, à Bordeaux de 225L et en Champagne 208L.
Le Foudre permettait de remplacer les antiques Dolias (jarre antique avec une contenance pouvant dépasser les 1 200 litres) dans la vinification.
(Image de Dolias)
Comment fabrique t-on les barriques ?
A l’heure actuelle, la plupart des fûts sont réalisés en chêne suivant ces étapes :
Le débitage des merrains : par fendage ou sciage. Le sciage étant plus rapide et entraînant moins de perte de bois (50% contre 80%). Les douelles sont moins solides et peuvent être plus poreuses (= une surface poreuse permet une insertion plus franche d’oxygène).
Séchage des merrains : Pour être bien travaillé, le bois doit être séché et atteindre une humidité de 16%. Cette opération peut se faire à l’air libre comme dans une étuve ventilée. A l’air libre, cela prendra 24 à 36 mois.
Le cintrage : Lors de cette étape, le bois est chauffé afin qu’on puisse lui donner une forme courbée. On peut utiliser le brûlage de bois de chêne, l’eau chaude ou la vapeur d’eau.
La chauffe de recuisson : Très importante, elle permet par la réaction de Maillard de former de nouveaux composés aromatiques à caractère grillé/caramel.
Selon le niveau de chauffe réalisé par les tonnelleries, vous allez obtenir un fût qui n’aura pas les mêmes caractéristiques : une chauffe forte (85 – 90°C pendant 75 minutes) va augmenter la teneur en whisky-lactone (noix de coco, cuir), une chauffe moyenne (70 -80°C pendant 55 minutes) sera optimale pour une teneur en vanilline (arôme de vanille).
Avec quel bois ?
Plusieurs espèces de chêne sont principalement utilisées comme le chêne pédonculé, occupant tout l’Europe avec ses 30-40 mètres de haut et sa longévité atteignant facilement 500 ans. Cette espèce est riche en ellagitanins (tanins du bois) et pauvre en whisky-lactone (noix de coco).
Le chêne sessile, son implantation s’étend de l’extrême nord de la péninsule ibérique jusqu’à la partie méridionale de la Scandinavie. Plus aromatique que le chêne pédonculé (whisky-lactone et eugénol=clou de girofle) mais moins de tanins. Pour rappel, les tanins sont des composés qui renforcent la résistance du vin à certains défauts ou maladies, ils sont également responsables de la couleur, du caractère et du goût du vin.
Le chêne américain, plus fréquemment utilisé pour le whisky ou le bourbon, est riche en composés aromatiques (vanille, noix de coco), mais a une faible teneur en ellagitanins.
Des fûts en acacia sont aussi fabriqués, leur avantage est d’apporter une bonne complexité aromatique mais aussi d’atténuer son marquage du vin par l’arôme de boisé et des tanins. Ils sont néanmoins plus cher.
Autrefois, des fûts étaient conçus à partir de châtaignier, de peuplier ou encore de frêne mais le chêne présente des caractéristiques indispensables à la fabrication d’un tonneau : facile à débiter, à cintrer et possédant une étanchéité incroyable.
Très bien… Mais quels sont les impacts dans tout ça ?
Lors de l’élevage, des phénomènes complexes se produisent :
Premièrement, une oxygénation lente (apport d’oxygène) à travers le bois, le trou de la bonde (80% de l’oxygène) et par les joints entre les douelles. Cette oxygénation permet d’arrondir les tanins présents dans le vin et est par conséquent, bénéfique pour son développement. Plus un fût est âgé, plus il y a de tartre qui limite les échanges ainsi que l’insertion de l’oxygène. Les vignerons doivent alors renouveler leur parc de barriques au fil des années.
Deuxièmement, une stabilisation de la couleur du vin. Des composés du bois sont dissous dans le vin, ce qui apporte des goûts fumés, de vanille, de cuir…
Troisièmement, le volume du contenant est très important. Comme vu précédemment, chaque région a des fûts de différentes tailles, plus une barrique est large, plus il y a de surface d’échange avec l’oxygène. Des cépages plus fragiles en termes d’oxygène comme le Sauvignon ou le Pinot noir sont plus adaptés pour des fûts de 400L ou 500L que l’on peut trouver en Loire. Mais des barriques de Bordeaux de 225L sont parfaites pour des cépages plus résistants comme le Cabernet Franc.
Concernant l’hygiène des fûts, elle est primordiale car les vinificateurs doivent éviter tout risque microbiologique donnant des goûts désagréables. Pour cela, le fût doit être nettoyé, puis “soufré” avec du So2 par des solutions comme le méchage.
Le prix d’une barrique varie selon les tonnelleries mais on peut compter environ 450€ à 860€ HT pour du chêne français. Certains vignerons se tournent vers le chêne américain, moins cher et ayant presque les mêmes caractéristiques.
On peut par ailleurs noter que dans certaines régions comme la Bourgogne et Bordeaux, les élevages de vin en fût sont une tradition historiquement inscrite dans le processus de vinification. Seulement 2 à 4% de la production mondiale de vin est issus d’élevage en barrique, l’une des caractéristiques principales des grands vins.